Environnement(s) et inégalités
Appel du RT 15, sociologie de la jeunesse
Les communications doivent être transmises via le site internet de l’AFS : https://afs-socio.fr
Des recherches portant sur les jeunes ou la jeunesse décrivent à diverses échelles la question des inégalités au sein d’un territoire donné ou entre territoires. Penser l’imbrication entre environnement(s) et inégalités au regard des questions de jeunesse invite à rendre compte de l’hétérogénéité de cette classe d’âge à la fois dans ses conditions de vie, ses pratiques, ses modes de participation politique ou associative, comme dans ses aspirations. Comment les recherches ayant pour focale les espaces de vie des jeunes (les quartiers, la commune, l’établissement scolaire, etc.), ou celles ayant pour arrière plan plus macro le dérèglement climatique ou de l’effondrement de la biodiversité, rendent compte des quotidiens des jeunes générations ? Quid de la place des institutions et des professionnel·les prenant en charge la jeunesse dans cette question contemporaine de l’environnement, dans les multiples acceptions de cette notion ? Quelles inégalités affleurent lorsqu’il est question du rapport aux environnements des jeunes, à la construction d’une cause environnementale ou de pratiques différenciées d’un souci environnemental ?
Cette question des inégalités invite à placer l’analyse à l’intersection des rapports sociaux, des politiques publiques, des institutions : les rapports d’âges constituent en soi un enjeu fort dans le rapport des jeunes à l’environnement et à leur(s) environnement(s). S’il est convenu que la jeunesse regroupe une classe d’âge hétérogène, ce congrès sera l’occasion de réfléchir sur les seuils d’âge et les formes de domination qui s’exercent entre jeunes et/ou entre générations. Au-delà des rapports d’âges, il convient de considérer les rapports de genre, de classe, de race, ou ceux liés au handicap, à la sexualité (liste non-exhaustive) qui déterminent les liens entre les individus et leurs environnements, et qui semblent à l’œuvre dans la persistance des inégalités.
Enfin, le congrès pourra être l’occasion, à travers la question de l’environnement et des inégalités, de questionner le rapport des jeunes à l’État. Comment les enjeux environnementaux contribuent à interroger la place, la valeur et/ou la légitimité des politiques d’État au regard des conditions de vie, en particulier dans la phase d’insertion socioprofessionnelle qui marque l’entrée dans la vie adulte ? Comment les jeunes se positionnent par rapport à des politiques prétendant prendre en charge la question climatique, mais opérant des priorités à même d’être discutées, contestées, parfois validées par les jeunes ?
Le congrès est constitué de sessions thématiques, et accueillera autant que possible des communications se plaçant en marge des questionnements évoqués. Outre une session générale sur des recherches portant sur les jeunes et la jeunesse, voici différentes sessions envisagées, au sein desquelles des propositions peuvent être formulées :
Session 1 : Socialisation politique, écologie et luttes des jeunes
Les opinions et comportements politiques des nouvelles générations ont longtemps été explorés à l’aune des processus de socialisation politique transmis au sein de l’univers familial, dans des logiques le plus souvent de continuité, et, dans de plus rares cas, de rupture avec les valeurs et préférences politiques transmises au sein de la famille. Les engagements contemporains des nouvelles générations viennent bousculer certains de ces mécanismes longtemps tenus comme inaltérables. Nous pensons notamment aux questions environnementales, mais aussi à celles liées à la justice sociale, aux discriminations, aux violences policières, à la cause LGBT+, etc., ou encore aux engagements conservateurs (féministes essentialistes, masculinistes, anti-écologiques, anti-LGBT+, …).
Nous proposons donc de questionner autrement ces dynamiques de transmission et les différentes sphères de politisation des nouvelles générations, à travers notamment :
– les nouveaux modes d’organisation et de structuration des collectifs auxquels participent les jeunes activistes
– les convergences observées avec d’autres mobilisations dans des logiques intersectionnelles
– l’usage des réseaux sociaux et leur influence dans la formation d’un capital militant
Dans quelle mesure aussi observe-t-on des formes de socialisation politique inversée, non plus des parents vers leurs enfants, mais des enfants politisés vers leurs parents parfois dépolitisés ?
De plus, les générations les plus récentes sont celles qui seront les plus concernées par la crise environnementale. Peut-on parler d’une conscience de génération vis-à-vis des enjeux à venir ? Comment celle-ci se déploie en fonction des lieux d’habitation et des caractéristiques sociales des jeunes ? Les mobilisations et discours autour de l’environnement sont en effet pluriels et se déploient également sur la totalité de l’échiquier politique.
Session 2 [session croisée avec le RT19, sociologie de la santé, médecine, maladie et handicap] : La santé des jeunes à l’épreuve des transformations environnementales et des conditions de travail
De nombreux rapports médicaux et en sciences humaines et sociales s’inquiètent des effets des environnement contemporains et des transformations environnementales en cours sur la santé des jeunes. Ils et elles sont présenté·es comme davantage touché·es par des cancers dont les causes seraient environnementales, par “l’éco-anxiété”, trouble émergent aux contours indécis, et plus globalement par des souffrances psychiques en lien avec les bouleversements climatiques. D’autres rapports et données statistiques montrent combien les jeunes sont plus exposés que d’autres classes d’âge à différents risques professionnels, notamment les plus précaires (intérimaires, apprentis, stagiaires). Leurs engagements dans le travail domestique et dans le travail de care au sein de la famille ont également des effets sur leur santé.
Comment les transformations environnementales et les transformations du travail viennent-elles affecter les jeunesses, leur état de santé somatique ou mentale ? Quelles préoccupations en matière de santé placent les jeunes au centre de l’attention politique, médiatique, et à l’initiative de qui ? Quels rôles jouent les jeunes dans la mise en visibilité de ces préoccupations et inquiétudes ? Cette session se structure en trois axes.
Dans le premier axe, on se demande comment sont catégorisés et investis les problèmes de santé des jeunes par les familles et les professionnel·le·s de santé et quels liens sont établis avec les transformations des conditions environnementales et du travail ? Comment ces catégorisations et ces définitions participent-elles à visibiliser, ou au contraire invisibiliser, la dégradation des conditions de travail et environnementales ? Quelles frontières entre santé environnementale et santé au travail sont créées par ces catégorisations ?
Le second axe s’intéresse aux santés affectées des jeunes en lien avec les conditions environnementales et de travail (professionnel et domestique). Il pourra réunir des travaux qui tiennent compte des expositions différenciées selon le genre, la classe et la race. De quels types de difficultés s’agit-il et comment sont-elles perçues différemment par des jeunesses plurielles ? Quelles conséquences ont-elles sur les trajectoires de vie et les rapports à l’avenir ?
Le troisième axe analyse le travail de santé par les jeunes et sur les jeunes. Quel travail est entrepris par les jeunes eux-mêmes, leurs proches, les professionnel·les qui les accompagnent pour préserver leur santé ou la santé d’autrui ? Quelles logiques de division du travail de santé leur situation révèle-t-elle (y compris dans les espaces domestiques) ? De quelles ressources économiques et sociales disposent les jeunes dans la prise en charge de leur santé ?
Session 3 : Pratiques de consommation des jeunes, environnement, inégalités
Les jeunes générations font l’objet d’une attention particulière dans le contexte de la crise climatique, du fait d’une idée répandue selon laquelle elles seraient nécessairement plus vertueux dans leurs pratiques de consommation que leurs aînés. La prise de conscience générationnelle des errements d’une société de consommation générant de la pollution, des déchets toxiques et de mauvaises conditions de travail, aboutirait nécessairement à une remise en cause profonde des pratiques, avec la recherche d’une consommation éthique et écologique. Ce grand récit nécessite cependant d’être questionné à l’aune d’enquêtes sociologiques sur la jeunesse et ses pratiques de consommation. S’il semble admis que la jeunesse est plurielle dans ses manières de consommer, comme elle l’est dans bien des dimensions de la vie, cette session encourage la présentation de recherches empiriques sur différents segments de la jeunesse : des jeunes “engagés” ou “conscients” des enjeux écologiques au point de réformer leurs pratiques de consommation et de demander des comptes à leurs aînés (“ok boomer ?”), aux jeunes qui développent des pratiques de consommation similaires à celles de leurs aînés, par exemple en matière de mobilité (voiture, avion, etc.), d’achats vestimentaires (fast fashion) ou d’alimentation (alimentation carnée). La question des moyens financiers des jeunes, souvent faibles (argent de poche, revenus d’emplois à temps partiels, précaires ou informels), se pose également concernant les déterminants de la consommation, la tension entre une volonté de mieux faire et la réalité de moyens financiers empêchant d’accéder à des biens de consommation éthiques ou écologiquement vertueux.
Questionner les pratiques invite bien sûr à une réflexion sur la socialisation à la consommation, mais aussi sur les inégalités dans les capacités à consommer de manière vertueuse : si la consommation écologique a un coût, les pratiques de consommation sont logiquement le reflet d’inégalités sociales qui permettent, ou non, de marquer une rupture en matière de consommation. Nous incitons fortement, pour mieux cerner les enjeux de socialisation, à prendre en considération les effets du genre, de la classe, de la race, ou toute autre dimension permettant d’affiner la compréhension profonde des comportements de consommation.
Enfin, il conviendra de questionner, au sein des populations jeunes et dans les rapports entre générations, l’état de la politisation des pratiques de consommation : qu’est-ce qui fait débat en la matière parmi les jeunes (qu’il s’agisse de jeunes “ordinaires” ou de jeunes spécifiquement engagés dans les luttes écologiques) ? Y a-t-il un effet des préférences politiques sur les pratiques de consommation, si oui de quelle manière ?
Cette session visant à ouvrir des questionnements larges sur les jeunes et leurs pratiques de consommation, il est possible de soumettre des communications portant, au-delà des enjeux écologiques, sur diverses dimensions des pratiques de consommation des jeunes.
Session 4 : Naturalisations de la jeunesse
Cette session propose d’interroger les processus de naturalisation dont la jeunesse fait l’objet. Cette notion est ici entendue dans une acception large : elle recouvre tous les processus consistant à assigner des propriétés spécifiques à la jeunesse et à les présenter comme légitimes en dissimulant leur caractère construit. La naturalisation est ici pensée non comme une fin, mais comme un moyen : elle peut faire l’objet d’une instrumentalisation dans différents espaces, par divers acteurs qui y ont un intérêt, y compris dans le groupe d’âge lui-même. Ce processus peut être interrogé à plusieurs niveaux :
D’abord, et pour mieux saisir les liens entre environnements et inégalités, on pourra s’interroger sur la naturalisation des (dis-)positions de certaines fractions minoritaires de la jeunesse, et du rôle que cette dernière joue dans leur altérisation (on peut ici penser aux jeunesses migrantes et aux jeunesses urbaines populaires, par exemple). Sur quelles asymétries sociales ces discours s’appuient-ils ? Quelles asymétries produisent-ils ?
Par ailleurs, les processus de naturalisation peuvent être interrogés à travers les catégorisations savantes dont la jeunesse fait l’objet (à l’instar des travaux sur les productions de la biologie, de la psychologie et des neurosciences à propos de l’adolescence et de ses pratiques numériques, par exemple). Dans quelles conditions ces catégories sont-elles produites ? Comment contribuent-elles à façonner les expériences des jeunes ?
Une autre manière d’explorer la naturalisation des dispositions est celle des mouvements sociaux, la jeunesse ayant historiquement été associée à un âge d’incertitude et d’apesanteur, favorisant les dispositions à la radicalité et la révolte, comme l’ont montré plusieurs travaux réalisés dans l’après-68. Quelle est la part de réalité ? Quelles objections ? S’il s’agit d’un stigmate, est-il endossé ou, au contraire, rejeté, selon les groupes ?
Il est enfin possible d’interroger plus directement la naturalisation de certains rapports sociaux d’âge ou de génération pouvant être renforcés par exemple dans des organisations professionnelles par des rapports de statut. Quelles sont les formes d’adhésion, de négociation ou de résistance vis-à-vis de ces rapports de pouvoir ? Comment les processus de naturalisation alimentent-ils des formes de distinction entre groupes d’âge et à l’intérieur d’un même groupe d’âge ?
Session 5 : Jeunesses, territoires & inégalités
Cette session sera l’occasion d’aborder la notion d’environnement, dans une dimension large (environnement social et géographique) à travers deux axes :
– Le premier axe se consacrera aux inégalités socio-spatiales dans les expériences de jeunesse. Les travaux consacrés aux jeunesses rurales, périurbaines, issues des quartiers populaires, ultramarines, migrantes ont montré le poids du territoire dans les différentes sphères de vie des jeunes (accès à la formation, à l’emploi, au logement, à la santé). Dans quelle mesure cette période de la vie peut-elle exacerber les inégalités inter et intragénérationnelles dans les rapports au territoire ?
– Le second axe accueillera des recherches qui questionnent la jeunesse comme une période de transition pendant laquelle les liens et l’attachement aux territoires peuvent être requestionnés. Au moment où se jouent l’entrée dans les études supérieures, l’insertion professionnelle, la conjugalité ou la parentalité, les jeunes peuvent transformer leurs ancrages locaux. Comment les ressources (familiales, amicales, scolaires, économiques, etc.) acquises dans leurs lieux de vie interviennent-elles dans le fait de rester, ou au contraire de quitter les espaces dans lesquels ils et elles ont grandi ?
Cet axe pourra inclure des travaux qui interrogent la mobilité institutionnelle et qui analysent les effets des déplacements de jeunes vulnérables d’institutions en institutions (familles d’accueil, foyer de l’enfance, établissements de placements judiciaires, centres éducatifs renforcés, centre éducatifs fermés etc.).
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Nous appelons l’ensemble des personnes qui se reconnaissent dans cet appel à proposer des communications pour le congrès, et encourageons vivement les jeunes chercheur·e·s (doctorant·e·s notamment) à proposer des interventions issues de leurs recherches. Nous rappelons qu’il est possible de proposer des communications ne se rattachant que partiellement aux problématiques développées dans cet appel.
Informations complémentaires :
Pour participer au Congrès, il faudra adhérer à l’AFS et s’acquitter de droits d’inscription. Lors du précédent Congrès de 2023, l’adhésion s’élevait à 41€ pour les non-titulaires et 103€ pour les titulaires ; l’inscription au Congrès à 61€ pour les non-titulaires et 152€ pour les titulaires. Les tarifs pour le Congrès de Toulouse seront légèrement plus élevés (inflation). Les collègues non-titulaires qui ne peuvent être financé.es par leur laboratoire pourront, sur présentation de dossier, être exonéré.es des droits d’inscription et bénéficier d’une aide pour le transport et le logement. La procédure pour la demande d’exonération des droits d’inscription sera précisée plus tard.
L’accès au Congrès se veut le plus inclusif possible :
* Des dispositifs de lutte contre les violences sexistes et sexuelles seront mis en place.
* Si vous avez besoin de services d’accompagnement en raison d’une situation de handicap, vous pourrez le signaler dans le cas où votre communication est retenue. Le comité d’organisation mettra tout en œuvre pour essayer de répondre à vos demandes.
* Si vous avez besoin de services de crèche pendant le Congrès vous pourrez le signaler au moment de l’inscription. Le comité local essayera de proposer un mode de garde